Je suis ravie d’ouvrir cette rubrique avec un article consacré à la série Suits que j’apprécie énormément, au point de la revisionner tous les deux ans. Derrière les tenues impeccables, les abords clinquants et rutilants, la rumeur de réussite à la New Yorkaise et les twists feux-de-l’amouresques, se cache un condensé de bons conseils à appliquer à votre quotidien en entreprise.
Mais avant tout, un bref synopsis pour les novices : Suits se consacre aux péripéties des membres d’un cabinet d’avocats réputé à New York, centré sur la relation mentor/mentoré entre un avocat brillant et son jeune protégé virtuose qui cache un lourd secret. C’est également entre autres la série qui a révélé Megan Markel – épouse du Prince Harry – dans le rôle de la jolie Rachel Zane. Si les deux principaux protagonistes sont deux hommes et que la série demeure bourrée de testostérone et démonstration d’égos capitalistiques en tout genre, les figures féminines ne sont pas en reste, participant aux trois valeurs que je vais présenter si après. Car, il y a de quoi s’inspirer pour être plus efficace dans vos prochains choix professionnels ou la constitution de votre future équipe. Démonstration en trois points.
Du mentorat à la loyauté
Je le décrivais dans un des premiers articles de ce blog (voir l’article sur le mentorat) : le mentorat est éminemment présent dans l’environnement anglosaxon. Et si vous n’étiez pas encore convaincu par ces effets, Suits est de toute évidence LA série illustrant avec le plus de justesse combien le mentorat booste une carrière. D’aucuns regretteront que cela soit martelé au cours des huit saisons (si l’un de vous trouve le nombre exact de fois où le terme mentor y est prononcé, je promets un cadeau !) et s’agaceront devant l’exemple de Mike Ross, jeune homme talentueux mais un peu perdu, qui reprend sa vie en main et gravit bientôt les échelons à la vitesse de la lumière grâce à l’influence du brillant et accompli Harvey Specter. A la fois manager, mentor et même coach, ce dernier n’hésite pas à corriger les écarts psychologiques et comportementaux de son protégé à grands coups de phrases coup de poing. L’exemple est peut-être un peu trop beau mais ça marche ! On finit par y croire à cette relation aux contours tout autant professionnels qu’amicaux avec le temps qui passe. Au passage, on notera l’effet « syndrome du scarabée » avec l’image du mini-moi car Mike Ross est clairement un mini-Harvey Specter. Mais heureusement, ce n’est pas le seul exemple que la série présente, sinon j’aurais écrit un tout autre article…
Car ce mentorat organique souvent masculin est loin d’être la seule figuration des effets du mentorat. Réel fil rouge de la série, les femmes aussi disposent de mentor, à l’image de Jessica Pearson, associée directrice et d’autre part mentor d’Harvey Specter. Sans le dire, l’axe narratif décrit cette femme charismatique, noire, saisissante d’intelligence et de leadership comme ayant mis de nombreux efforts à atteindre ce poste ultime que peu de femmes peuvent se targuer d’effleurer… avec l’appui non négligeable d’un mentor, un vieil homme blanc. Exit le syndrome du scarabée, ici ! Cependant, on peut se demander légitimement si le support de cet homme était un besoin nécessaire à l’ascension de Jessica, de toute évidence taillée pour le poste. Les statistiques du livre « Les femmes travaillent, les hommes triomphent » de Gitty-collins en témoignent malheureusement : le talent et la compétence seuls ne suffisent pas toujours aux femmes à s’élever hiérarchiquement dans une entreprise. L’accès à un mentor, quel qu’il soit, ouvre des perspectives et valident un impensé collectif peut-être irrationnel à juste titre. D’ailleurs, la série prend le parti d’une réussite professionnelle hors du mentorat quasi impossible avec notamment le cas de Louis Litt. Brillant mais excentrique, soupe-au-lait et sournois, ce dernier met du temps à se faire apprécier par sa hiérarchie et ses collègues, et de même, à trouver un mentor (il n’y parviendra pas justement), au point où son élévation dans la société se fera à l’aide de moyens détournés qui le discréditeront d’avantage. Sa rédemption sera issue de sa propre conversion en mentor d’une nouvelle jeune avocate, rompant ainsi son isolement. Car là demeure la force du mentorat en général et celui décrit dans Suits : on se sent moins seul lorsque l’on est épaulé ou qu’on épaule. Someone has your back. Et l’humain étant un animal social, la rupture de l’isolement vous rend plus appréciable aux yeux des autres et à tendance à vous ouvrir plus de portes par mimétisme.
Enfin, la trame s’étire sur le sentiment de loyauté induit par ce mentor trop beau pour être vrai. Allant au-delà du seul rôle de conseiller professionnel, c’est le sentiment d’appartenance à une équipe et l’omniprésence de la redevance qui soutiennent ici une loyauté à toute épreuve, placée au niveau de l’Olympe, sorte de nectar servi dans le saint graal de la relation humaine, bonus salutaire à la relation mentor/mentoré mais qu’il ne faut pas forcément espérer retrouver de façon réaliste dans la vraie vie, dans un contexte de management non-anglosaxon.
Le goût de l’excellence
L’excellence, voilà un terme qui fascine autant qu’il répulse lorsque l’on constate l’installation d’une culture de la moyenne dans certaines entreprises. D’une part, les plus proactifs et passionnés redoutent de faire de l’ombre à leur manager (qui pourrait se venger) et d’autre part, rares sont ceux qui se contentent de rester planquer (quitte à faire semblant). Sortir du rang d’une façon ou d’une autre est un exercice qui peut s’avérer dangereux. Ajoutons à cela un rythme de récompense pas toujours à la hauteur des bons éléments qui se démotivent et finissent par aller voir ailleurs (souvent à cause d’un management mortifère). C’est sur ce cas précis que la série Suits infuse un goût enivrant du sens de l’excellence.
Chaque protagoniste s’impose comme discipline d’être le ou la meilleure dans son domaine. Les différents épisodes prônent l’excellence, la recherche de la performance, le dépassement de soi. Ca bosse dur chez Suits et toutes les intelligences sont mises en commun – émotionnelle, intellectuelle, etc. Jessica Pearson fait figure d’une des meilleures avocates de la ville, Harvey remporte dès le premier épisode le titre du meilleur négociateur, Donna est la meilleure secrétaire juridique de New York – si ce n’est de l’univers, ndlr – Rachel est la meilleure paralégale. Et Mike Ross, c’est Mike Ross, le génie à la mémoire photographique. Peu importe sa position, chacun se dépasse et donne leur meilleur de lui-même. Cela peut paraître extravagant et ridicule, un brin étouffant, mais pour ma part, cela me donne clairement envie de faire pareil et de me dépasser dans un métier et des activités que j’aime (tout en gardant un certain équilibre). Ce diagnostic résonne avec celui du monde du travail actuel, notamment salarié, avec une crise des vocations, des démissions en recrudescence et de la souffrance mentale. Se plonger, dans un univers, certes imaginaire, où des travailleurs apprécient leur métier et ont le sens d’y exceller peut motiver vos choix de changement et pourquoi pas de reconversion.
La confiance en soi comme religion
Toutes les études tentant de justifier les différences salariales et de carrière entre hommes et femmes le martèlent : les femmes manquent de confiance en elle. Alors, s’il est possible de s’imprégner de l’assurance de personnages de fiction, c’est bien Suits qu’il faut regarder !
L’immense confiance en soi qui se dégage des personnages donne facilement les plus profonds complexes tout en suscitant les plus grands fantasmes. A ce titre, si vous n’avez pas encore découvert la série et souhaitez un avant-goût, les vidéos compilation pullulent sur Youtube, agrégeant les punchlines d’Harvey Specter et décortiquant l’attitude de Jessica Pearson.
Cette dernière, en tant que mentor d’Harvey Specter, incarne la femme dirigeante tenant d’une main de fer dans un gant de velours ce cabinet parmi les plus prestigieux de la ville. Port de tête altier, vestiaire impeccable, démarche conquérante, sa posture lors des conversations difficiles et sa capacité à maîtriser ses émotions même placée au pied du mur proposent une réelle feuille de route pour performer soi-même. A l’instar d’Harvey Specter, si ce n’est plus, Jessica Pearson incarne un condensé presque qu’infinie de confiance en soi. Pour les connaisseurs du genre, cette figure de surfemme, noire, brillante à la beauté envoutante et séductrice, s’illustre aussi dans les personnages d’Olivia Pope (Scandal) et Annalyse Keating (Murder).
D’autres protagonistes féminins plus accessibles comme Donna Paulson, la charismatique assistante juridique, ou Rachel Zane l’aspirante avocate, inspirent par leur progression en phase avec leur personnalité et l’espoir que chacune d’entre nous peut atteindre un niveau de confiance réaliste. Mike Ross, bien qu’influencé par son mentor, voit croître sa confiance en lui tout au long de la série tout en conservant son empathie et un brin de maladresse.
Ici, la confiance en soi s’incarne dans la posture, le costume, la démarche. Après tout, c’est le nom de la série (Suits = costume). Les fashionista et les amateurs de costume Tom Ford seront ravis face aux coupes ajustées, aux robes de grands créateurs, ravivant le débat autour de la présentation physique dans le monde du travail (voir la rubrique « Mode et Travail»). Il existe une attitude « Suits », voire même une façon de marcher « Suits » notamment chez les femmes : les jambes avançant en se croisant, l’allure toujours vive – après tout, il y a toujours une urgence – et les bras se lançant au rythme de cette échappées sauvage dans les couloirs d’un gratte-ciel de la cinquième avenue. Les plus féministes d’entre nous réprouveront l’absence de diversité de morphologie, et la persistance des talons hauts et des silhouettes longilignes empaquetées dans des jupes crayons et des tailleurs de ladyboss. C’est là l’une des critiques que l’on pourrait apposer à cet univers de l’hyperpouvoir, de la féminité et de la masculinité idéalisés et assertifs. Cependant, comment ne pas être fascinée et s’imaginer soi-même évoluer aussi fièrement entre deux salles de réunion ?
Conclusion
Le monde des séries regorgent d’exemples venus d’un monde du travail souvent fantasmé et Suits ne fait pas exception. En revanche, de nombreuses leçons de management, de savoir-être et de savoir-faire peuvent être tirées de ces scénarios alambiqués.
Suits demeure une belle série sur l’univers du monde du travail entre glamour et dépassement de soi dont les première saisons méritent d’être vue au moins une fois pour piquer quelques punchlines et silhouettes coutures 😉
Et vous, quel personnage/série vous motive ou vous a motivé dans votre carrière professionnelle ?